De plus en plus, de grands acheteurs privés et publics intègrent des critères de développement durable à leurs pratiques d’approvisionnement. Mais comment procèdent-ils concrètement ? 

Afin d’en savoir davantage sur les nouvelles exigences en développement durable, Anne Gaboury, conseillère en développement durable au Centre québécois de développement durable (CQDD) s’est entretenue avec Julie Gosselin, directrice de la Section approvisionnement du Service des ressources financières et Sarah Pomerleau, coordonnatrice au développement de l’approvisionnement responsable, toutes deux de l’Université de Sherbrooke (UdeS). Cet échange permet d’en savoir un peu plus sur la démarche de développement durable de cet organisme public et ses nouvelles attentes envers ses fournisseurs. 

Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots votre démarche d’approvisionnement responsable ?

« En cohérence avec sa démarche de développement durable, l’UdeS a adopté en 2009 une politique d’approvisionnement responsable. Un code de conduite a ensuite été élaboré afin d’énoncer les attentes de l’UdeS envers tous ses fournisseurs. Ce code est d’ailleurs inséré à même les documents d’appel d’offres pour les achats de 25 000 $ et plus. En répondant au formulaire de soumission, les fournisseurs doivent signer le code et se conformer aux règles et procédures reliées au développement durable dictées par l’UdeS ».

Qu’est-ce qui vous a amené à intégrer des exigences de développement durable dans vos pratiques d’approvisionnement ?

« Considérant que l’UdeS est assujetti à la Loi des contrats des organismes publics, une marge préférentielle d’au plus de 10 % du montant total peut être accordée aux  entreprises qui répondent aux exigences de développement durable prévues dans les appels d’offres. En 2014, nous avons analysé tous les contrats dans lesquels la marge préférentielle avait été utilisée et à notre grande surprise, nous avons remarqué que cette dernière n’avait pas été, dans bien des cas, un facteur déterminant dans l’adjudication d’un contrat. Comme l’adoption de bonnes pratiques de développement durable par nos fournisseurs est important pour l’UdeS, nous avons décidé d’intégrer des exigences en la matière à nos appels d’offres récurrents, c’est-à-dire des critères de conformité et d’admissibilité. Ces derniers font partie de nos exigences pour octroyer un contrat.

Afin de nous assurer que les entreprises aient la capacité de répondre à ces exigences et que celles-ci soient conformes à la législation, nous devons réaliser une étude de marché spécifique pour chacune de nos grandes catégories d’achats. Nous souhaitons ainsi nous assurer que les entreprises ont la capacité de répondre à nos exigences sans limiter le marché. Nous nous assurons ainsi que le marché soit prêt à recevoir ce genre de critères. L’UdeS demeure ouverte à la discussion en cours de processus jusqu’à l’ouverture de l’appel d’offres avec les entreprises qui ne semblent pas en mesure de répondre à ces exigences dans l’immédiat. Dans certains cas, nous révisons légèrement nos exigences pour l’ensemble des fournisseurs potentiels en leur permettant de se conformer aux critères de développement durable dans un délai prescrit. De cette manière, l’UdeS agit à titre de levier pour inciter le marché à être plus responsable; non seulement les fournisseurs intègrent de bonnes pratiques, mais ils poursuivent également leurs efforts dans une logique d’amélioration continue.

L’UdeS utilise également les avis de qualification afin de construire une liste de fournisseurs responsables pour des services précis. C’est une manière différente de préparer le marché et de divulguer les exigences en développement durable auxquelles les fournisseurs devront répondre ».

Pouvez-vous nous donner quelques exemples de pratiques que vous exigez de vos fournisseurs? 

« Ayant déjà été membre de l’Espace de concertation sur les pratiques d’approvisionnement responsable (ECPAR), nous avons eu accès à des fiches de produits responsables.Ces fiches sont un des outils utilisés dans l’analyse des marchés. La détermination des critères découle d’un travail de collaboration entre les coordonnateurs à l’approvisionnement responsable et les requérants qui permet de cibler les exigences qui sont les plus responsables pour un tel produit ou un tel service. Les critères de développement durable dans les appels d’offres peuvent être axés autant sur le produit que sur les pratiques du fournisseur. ».

En somme, diriez-vous que le positionnement des PME en développement durable soit réellement un atout pour l’UdeS ?

« Pour nous, une démarche de développement durable structurée aura un effet de levier permettant d’améliorer l’ensemble des pratiques de l’entreprise. Une PME qui démontre qu’elle peut répondre aux principaux critères tels que le prix et la qualité, en plus de répondre à ceux de développement durable, représente un atout auprès de notre institution ».